Nico Krebs & Taiyo Onorato

Michel Mallard et Raphaëlle Stopin renouvellent la programmation photo des galeries de la Fnac avec un ensemble de dix expositions individuelles de Mathieu Bernard-Reymond, Stephen Gill, Scarlett Hooft Graafland, Nico Krebs et Taiyo Onorato, Janne Lehtinen, Christophe Maout, Jürgen Nefzger, Loan Nguyen, Stefan Ruiz, Kyoichi Tsuzuki. À partir du 18 avril dans les galeries de la Fnac. Exposition collective à partir du 3 juillet aux Rencontres d'Arles.

Les dix regards rassemblés dans Terrains d’entente (auteurs émergents et artistes confirmés) restituent, sous l’angle de la performance, de la fiction ou du document, un point de vue ludique sur le paysage contemporain. Le paysage, urbain ou rural, est une terre de re-création, une aire d’étonnement, d’amusement. Il n’est pas ce corps étranger à l’homme qu’il lui faut regarder de loin, dans une contemplation déférente. À l’heure où la prise de conscience écologiste fait fleurir une photographie prenant acte des mutations subies par le paysage naturel, et alors que celle-ci induit comme un état de fait l’incompatibilité de l’homme et de la nature et l’ascendance vorace de l’un sur l’autre, le paysage est ici terrain d’entente. Le photographe ménage au travers du champ de son image un espace de cohabitation, où règne la possibilité d’un ordre harmonique. Et pour voir l’éden à sa porte, chacun fait ses petits arrangements avec la réalité.

KYOICHI TSUZUKI > Roadside World

On pourrait le dire tour à tour journaliste, artiste, voyageur, commissaire d’exposition ; en vérité, Kyoichi Tsuzuki est tout à la fois. Chez lui, le spectre des pratiques n’a d’égal que celui de ses intérêts. Tsuzuki regarde et voit, là où nous passons notre chemin. Le sujet de ses investigations : le vernaculaire, l’anonyme, l’amateur. D’abord homme de mots (il est rédacteur en chef puis directeur de collection de 1976 à 1992), Kyoichi Tsuzuki leur adjoint l’image afin de compléter le document. Première contrée explorée : le Japon. Roadside Japan – somme des attractions touristiques (et excentriques) recensées sur tout le territoire japonais – est la première étape de son tour du monde de l’insolite. Il parcourt ensuite le reste de l'Asie, l'Europe et dernièrement chacun des cinquante-deux États de l'Amérique. L'exposition rassemble, en une mise en regard des deux pôles que sont le Japon et les États-Unis, une documentation unique sur le sujet de l’art vernaculaire et les décors délirants construits par ses artistes anonymes.


Kyoichi Tsuzuki, La plus grande commode du monde, de la série Roadside America.

La plus grande commode du monde, Caroline du Nord, États-Unis
"Capitale du meuble", High Point, Caroline du Nord, abrite de nombreux fabricants et leurs boutiques. On y trouve également la Plus Grande Commode du Monde, 11 mètres de haut sur 9 mètres de large, avec une chaussette qui dépasse d'un de ses tiroirs : l'art, on le sait à High Point, est dans le détail.
Construite en 1926, cette vénérable commode devait renvoyer dans ses buts la Plus Grande Chaise du Monde, érigée en 1922 dans la ville voisine de Thomasville. La Chaise, ce n'est en fin de compte qu'une chaise, tandis que la Commode, elle, contient la MJC du coin…



Kyoichi Tsuzuki, Fraise-abribus, de la série Roadside Japan.

Fraise-abribus, Nagasaki, Japon
Sans vraiment évoquer l'attaque des tomates tueuses, ces abribus en fruit ne manquent pas de jus. La ville de Konagaicho au nord-ouest du Kyushu donne sur la mer Ariake, réputée pour ses bancs de sable et ses petits poissons sauteurs, vivant dans la boue. Juste à côté se trouvent Takesaki, célèbre pour ses crabes, et les montagnes d'Unzen Fugen. À part cela, il n'y a pas grand-chose à voir à Konagaicho. C'est pourquoi un publicitaire de génie a gratifié cette ville productrice de fruits du concept d'abribus en forme de fruit. Fort colorés et tout à fait uniques, ils ont acquis une telle réputation qu'une douzaine d'arrêts se sont transformés en fraises, melons, pastèques et mandarines. Il est prévu bientôt de faire « fructifier » l'ensemble des arrêts de bus de la ville ; il y a quelque chose de drôlement émouvant dans le face à face, de part et d’autre de la nationale, d'une grosse fraise rouge vif et d'un vieil abri dégradé. Les fruits sont d'un détail méticuleux, la fraise avec ses taches foncées, le melon au pâle motif de dentelle, et leurs coloris encore très frais.

« Ce sera lequel, le prochain ? » Aux dires d'une revue de voyages, on ne parle que de ça, à Nagasaki. Pourtant, lors de ces prises de vue, avant que je puisse photographier quoi que ce soit, tout le monde est sorti en catimini de son abribus en peau de fruit pour attendre son bus juste à côté. J'avoue que j'ai compati.



Kyoichi Tsuzuki
est né en 1956 Tokyo, où il vit et travaille. Il se dirige vers la photographie au début des années 1990 et reçoit le prix Ihei Kimura de la Photo en 1996 pour Roadside Japan. En 2001, il publie Universe for Rent, une recherche approfondie de 850 pages dédiée aux habitats nippons. Parmi ses expositions personnelles, notons Happy Victims (série sur les fashion victims japonaises, heureuses de l’être) présentée successivement au Festival de Hyères, The Photographers’ Gallery, Londres et au Musée d’Art Moderne Grand-Duc Jean, Luxembourg.


Au cours des dix dernières années, Kyoichi Tsuzuki publie successivement aux Éditions Aspect, Roadside Japan, Roadside Europe et prochainement Roadside America.



Fnac Ternes, Paris, du 18 avril au 12 mai 2007

Fnac Aix-en-Provence, du 16 juin au 18 août 2007